Depuis 2015, HF île de France soutenu par la Ville de Paris, la Préfecture, la Drac et le Ministère de la Culture, propose très officiellement des journées du Matrimoine « afin de valoriser l’héritage culturel des créatrices du passé ». Cette année, ces journées ont duré une semaine, mettant en valeur la « peintresse » Roberta Gonzàlez (1909-1976) restée « dans l’ombre de son père le sculpteur Julio Gonzàlez et de son mari, le peintre Hans Hartung ».
Le Matrimoine ratisse large, des poétesses Marie de France (1160-1210) ou Marceline Desbordes-Valmore (1786-1859), à l’archéologue Christiane Desroches-Noblecourt en passant par Barbara (dont, rappelons-le quand même, un des plus grands succès s’intitulait « Mes hommes » ! ). Sont réhabilitées ainsi des salonnières longtemps honnies au nom de la modernité, du sens de l’histoire, de la lutte des classes, comme la comtesse Anna de Noailles qui eut le Tout Paris à ses pieds. L’idée générale, remettre en lumière « les grandes oubliées » est fort louable car, effectivement, les femmes n’ont pas eu les mêmes possibilités d’accès à la notoriété que leurs homologues masculins. Mais Madame de la Fayette, George Sand ou la musicienne Germaine Tailleferre (seule femme du Groupe des Six) ont, c’est heureux, réussi à s’imposer dans « un monde d’hommes » ; méritent-elles pour autant un « femmage » sic ? Car ne dites plus « hommage » ce serait réac et presque offensant. Ce qu’aurait de propre, de particulier, un « femmage » par rapport à un hommage (excepté qu’il s’adresse à une femme) exige de définir en quoi la création féminine se distingue de celle des hommes ; vaste sujet polémique car nombre de créatrices pensent précisément que la création n’a pas de sexe !
Cette revendication féministe de « Matrimoine » vise peut-être à contrer la vague Woke venue d’Amérique et qui, elle, va jusqu’ à éradiquer la notion de féminin (ainsi un woke ne dit plus « lait maternel » mais « humain ») : à ce sujet, le livre de J-F Braunstein qui vient de paraître est édifiant et même terrifiant quand la transsexualité vire au suprémacisme (1).
Or le Wokisme est déjà infiltré dans nos musées. Ainsi, au musée des antiquités de Saint Germain en Laye, je fus surprise par un panneau explicatif annonçant des statues-menhirs, masculines, féminines et … transgenres ! Or c’étaient les journées du Patrimoine, pas le premier avril avec clin d’œil possible à un thème contemporain. Ici, du sérieux : une statue dont les attributs masculins avaient été effacés, remplacés par des caractéristiques féminines était qualifiée tout de go de transgenre. Or nous ne savons pas ce que ces transformations recouvraient (une guerre avec un vainqueur imposant ses divinités ?). Coller sur un passé si lointain une notion ultra-récente est arbitraire, le menhir transgenre relève d’une relecture du passé orwellienne.
Le premier titre soumis à mon éditeur n’était pas les « Mirages de l’art contemporain » mais « Vers un nouvel ordre mental, la stratégie de l’Art contemporain » car je sentais bien que le fait de nommer « art » ce qui n’en était pas vraiment (une pièce vide par exemple)(2), ou encore de ne pas reconnaitre comme « auteur » celui qui travaille de ses mains la statue qu’on lui commande (mais d’en gratifier le commanditaire), tous ces procédés et ceux mis en scène par les performances ou installations étaient un moyen de manipuler le spectateur pour le faire douter de ses sens, comme du sens commun. Voilà qui disposait à un nouvel ordre mental, à l’époque en gestation, l’AC jouant, au mieux, le rôle d’ « idiot utile ». Le « wokisme » décrit par le livre « La religion woke » de J-F Braunstein a bénéficié de cette préparation des esprits. Des sujets à approfondir si on veut éviter qu’un jour, les journées du Patrimoine, comme celles du Matrimoine, sombrent sous les coups de la « non-binarité » et du « gender fluide » : les journées du « fluidimoine » sont en vue…
Christine Sourgins
(1) Jean-François Braunstein, « La religion woke », Grasset, septembre 2022. Voir en particulier les pages 142 à 147 sur l’éradication du féminin et des femmes.
(2) Si l’AC est un art, c’est en tant que technique : technique de manipulation du spectateur. Une technique qui impose quand le « grand art », lui, proposait.