Et l’Art dans le Grand débat ?

29 janvier 2019

Rémy Aron, l’ancien président de la Maison des artistes, lance une pétition : « Stop au dirigisme artistique d’État ! Pour un respect de la diversité ! » ? En ces temps de discussions animées, y aurait-il une chance pour que les politiques écoutent enfin ? Diversité ne signifie pas forcément qualité mais c’est un préalable et une obligation démocratique.

Constatant l’échec de l’Etat (200   » inspecteurs de la création « et pas un seul artiste français au Top 200 des artistes mondiaux), que son inféodation à la spéculation financière multiplie pratiques opaques et conflits d’intérêts etc., la pétition en souligne les conséquences : l’exclusion des lieux institutionnels de la plupart des artistes non-alignés sur l’esthétique « Art Contemporain » globalisable et financiarisable, la disparition des savoir-faire etc. Les pétitionnaires demandent donc la création d’un groupe de travail parlementaire sur l’intervention de l’Etat dans la création artistique avec audit, publication d’un état des lieux et propositions de réformes. Vous pouvez la signer sur change.org. La précédente commission, sous F. Hollande, n’avait même pas audité le président de la Maison des artistes (!) se cantonnant à écouter les hommes du système. L’administration, comme la presse française, restent dans le déni de la dissidence française … mieux connue à l’étranger.

S’il y a de la contestation dans l’Art, il y a aussi de l’Art dans la  contestation. Dès novembre, Bansky a revendiqué sur Instagram une œuvre réalisée à Paris (un gilet jaune jetant un bouquet de fleur), avec ce commentaire : « Cinquante ans depuis le soulèvement de Paris en 1968. Le lieu de naissance de l’art du pochoir moderne ». Si beaucoup d’actuels graffitis répondent à ceux de 68, comme « Faites l’amour, pas la galère », d’autres apportent une note écolo, très XXIème siècle : « Des banquises, pas des banquiers !». Le street-art (et c’est le moindre de ses paradoxes) est à la fois local et global, grâce à internet, il est donc un moyen idéal de diffusion des idées ou des soutiens. D’où la fresque  réalisée à Miami, dans le quartier de Wynwood réputé pour ses œuvres en plein air, par MTO, un artiste français : des gilets jaunes anonymes se tenant la main en dessous de l’inscription : « Et d’ici Manu, tu nous entends ? ».

Bien entendu, les ronds-points, lieux emblématiques de la contestation, ne sont pas en reste. Depuis des lustres on y érigeait des œuvres d’art, pas toujours plébiscitées par la population locale, or, le 8 décembre sur un rond-point à Wasselonne, en Alsace, est apparu un gilet jaune, œuvre  du vitrailliste Roland Pfann, qui a même reproduit les bandes réfléchissantes grâce à un verre spécial.  Cliquer

Il y eu aussi l’initiative du street-artiste Pascal Boyart, PBoy, détournant « La liberté guidant le peuple » de Delacroix en y incrustant des gilets jaunes, rue d’Aubervilliers, à Paris. Mais l’esprit du temps ludiquo-lucratif reprenant ses droits, l’artiste y glissa douze mots codés cachés permettant de gagner 1000 € en bitcoin via un flashcode. Beaucoup plus polémique est la fresque en grande partie noir et blanc qui vient d’être peinte, ce dimanche, au même endroit (un espace autorisé pour l’art de rue) par le groupe Black Lines : 30 mètres de long sur le thème « Hiver jaune » et qui met en valeur Christophe Dettinger, le boxeur incriminé dans une échauffourée avec la police. Sans oublier une famille groupée devant le fenestron télévisuel où s’affiche « Rêve-olution »…A suivre.

Christine Sourgins